Chimère sarde

Les chimères à deux têtes peuplent le monde de l'héraldique. Aigles, Faucons ou dragons bicéphales sont mis en scène selon une symétrie propre à identifier rapidement et sans ambigüité une terre et ses nobles propriétaires

Pour les pipes à deux têtes la symétrie est un choix possible mais non imposé. On voit dans ce chapitre que certains pipiers l'adoptent soit pour des raisons techniques^[1], soit par motivation esthétique^[2].

L'artisan sarde Tommaso Spanu^[3]rompt avec la géométrie en proposant une pipe qui possède effectivement deux fourneaux cote à cote, mais il donne a chacun d'eux son individualité propre.

La volonté d'affirmer une asymétrie de l'objet s'exprime ostensiblement par le traitement de la surface supérieure des foyers, lisse et courbe à droite, "en plateau" teinté de noir à gauche. Mais cela va plus loin.

Les surfaces extérieures sont complexes et différentes de chaque cotés. Si bien que même avec de multiples illustrations, il est difficile de se faire une idée globale des lignes qui gouvernent cette pipe. On est loin du déchiffrage immédiat d'un blason. Tout se passe comme si l'artisan avait voulu faire un pied de nez à la disposition en balance de part et d'autre de la tige.

La distinction entre les deux fourneaux peut être mise en perspective avec une suggestion du pipier sarde : il propose d'en bourrer un avec un tabac à base de Perique et l'autre avec du Virginie. Cela ne me convainc guère mais n'enlève rien à mon admiration devant cette pipe qui reste sans doute difficilement fumable.